Dr Jean Martin
La violence fleurit, partout, sous tant de formes. En vrac : dans notre pays un féminicide tous les quinze jours. Pas loin de chez nous, des enseignant·e·s sérieusement molestés voire tués, par des ados sous influence communautariste ; l’école ne parvient pas à maitriser le phénomène, pire, les enseignant·e·s craignent de traiter de sujets fondamentaux mais devenus délicats.
Le 47e président élu des Etats-Unis personnifie plusieurs types de suprémacisme délétère dont on pensait que nos pays se débarrassaient tant bien que mal… Les conflits à l’Est et au Sud de chez nous montrent le mépris jusqu’à plus soif du droit humanitaire et de la guerre.
Dans notre vie politique, la violence n’était pas familière grâce, à notre crédit, à la culture du dialogue dans le débat – à la place des invectives. Mais les choses changent, les élu·e·s sont de plus en plus souvent insultés voire menacés.
Horizons, magazine du Fonds national suisse, publiait (no 138) un débat sur le thème: « Faut-il doter les robots de morale? ». Johan Rochel, de l’EPFL, pense que oui. Peut-être feraient-ils mieux que nous ?
Je suis assommé par l’évidence de mon impuissance, notamment de voir tuer dans plusieurs domaines les espoirs de coexistences pacifiques. Vaut-il la peine de labourer les mêmes sillons, avec des plaidoyers pour le vivre-ensemble et l’avenir de nos enfants et petits-enfants ?
Une formule vient à l’esprit « Nous avons trouvé l’ennemi, c’était nous-mêmes ! » Dans ce bouillonnement de brutalités, nous devons accepter une part de responsabilité. Nous sommes sérieux, travailleurs, mais notre société a laissé fleurir des sentiments d’injustice, des rancœurs, des motifs d’être en colère. D’un autre côté, nous avons « laissé passer » trop de choses.
Pour une large part, c’est là une question d’éducation, de formation. A ce sujet, le Centre pour l’action non-violente (CENAC) proposait le 1er décembre à Lausanne une discussion entre une spécialiste de droit pénal, un philosophe et un psychiatre sur les racines et les dimensions de la violence – la problématique est évidemment multifactorielle. Comme dans mon domaine la santé publique, il importe d’abord de vouloir prévenir : prévention primaire, avant les dégâts (avec là le rôle cardinal de l’éducation), et prévention secondaire (interventions ciblées quand les choses sont mal engagées). Quand les situations tournent au registre pénal et dans une optique de réhabilitation, il y a lieu de recourir davantage à des modalités comme la justice restauratrice et à la médiation (qui cherchent à progresser, à soulager, par le dialogue entre victimes et auteurs).
Face à la violence : en amont, sensibilisation et éducation au niveau collectif ; en aval, soutien/encadrement pour les personnes en danger ou qui mettent en danger.